Un certain homme ne savait pas à grand’peine le Pater noster ; il demanda un
conseil pour son âme à sainte Brigitte, à laquelle Notre-Seigneur dit : Plus me
plait la simplicité de ce pauvre homme simple que la prudence des superbes,
d’autant que leur superbe les éloigne de Dieu, et en celui-ci, l’humilité
introduit Dieu dans son cœur, partant, dites-lui qu’il continue comme il a fait,
et il aura la récompense avec ceux dont j’ai dit : Venez, vous qui avez
travaillé, et je vous soulagerai avec le pain éternel ; car si je lui dis comme
j’ai dit à Judas quand il me demandait conseil trompeusement : Gardez les
commandements et vendez ce que vous avez ; il ne pourra le souffrit, d’autant
que la vieillesse fuit la reforme et que la pauvreté n’a rien à vendre.
Néanmoins, les commandements de Dieu sont nécessaires à ceux qui tendent à la
vie éternelle, car sans eux l’homme ne peut être sauvé, s’il peut en être
instruit. Mais quant à cet homme, sa docte folie et sa bonne volonté me plaisent
en telle sorte comme les deux deniers de la veuve que j’ai préférés aux présents
des rois, car en sa folie, il a toute la sagesse, car il m’aime de tout son
cœur. Mais d’où vient cet amour, sinon de mon Esprit? et ceci semble folie aux
sages du monde de n’aimer les richesses et de ne savoir parler des grandes
choses ; Partant, je l’appelle docte folie, d’autant qu’il puise de moi la
sagesse, qui consiste à aimer Dieu.
Ne vous semble-t-il pas sage, celui qui ne sait qu’une parole : aimer ? Par
cette délection, il garde tous les commandements de la loi de Moise ; par
icelle, il donne à Dieu ce qu’il lui faut donner ; par icelle, il garde tous les
conseils ; par icelle, il garde tout le droit et les lois ; par icelle, il aime
son prochain, ne désirant point le bien d’autrui, ne trompant point son prochain
; par icelle, il se souvient incessamment de la mort et du jugement, dont je le
dois juger : et partant, celui qui veut venir à moi ne se doit inquiéter de
l’ignorance de la loi, pourvu qu’il veuille se servir de sa conscience, qui dit
qu’il veut pâtir ce qu’elle voudrait faire à autrui.
Car pourquoi l’homme feuillette-t-il tant et tant de livres ? n’est-ce pas pour me servir ? n’est-ce
pas plus pour sa curiosité, ostentation et pour être appelé docte ?
Véritablement, chacun sait en sa conscience et chacun est jugé par icelle.
Partant, ma fille, celui qui dit d’une foi parfaite et d’une bonne volonté ces
paroles : Jésus, ayez miséricorde de moi, me plaît plus que celui qui dire cent
versets sans attention.
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