Manière dont Sainte Brigitte voyait quelque démon s'enfuyant avec confusion d'un homme qui priait, lequel le démon avait fort troublé par ses tentations, et en quelle manière le bon ange déclare la vision à l'épouse.
Chapitre 3

L'épouse voyait un démon auprès d'un homme qui priait ; et ayant demeuré là une heure les mains liées, soudain ce démon s'écria d'une voix horrible et épouvantable, et tout confus, se retira de celui qui priait, duquel le bon ange parla à Sainte Brigitte, disant : Ce démon a troublé quelque temps cet homme ; et d'autant qu'il ne l'a pu vaincre, il paraît les mains liées, car cet homme avait généreusement résisté au diable, de sorte que c'était un juste jugement de Dieu que le démon n'ait pu faire ce qu'il voulait.

Le démon pourtant a encore quelque attente de la surmonter ; mais à cette heure, il a été vaincu en choses faciles, mais jamais il ne sera surmonté. Or, depuis, la grâce de Dieu de jour en jour, et partant, le démon criait de toutes ses forces, disant qu'il avait perdu celui qu'il avait tant de fois combattues pour le vaincre et le supplanter.

DÉCLARATION
L'homme dont il est parlé en ce chapitre fut un Frère tenté douze ans sur le saint Sacrement, et sur le nom de la Sainte Vierge, qu'il ne pouvait prononcer sans quelque sale pensée. Par les prières de Sainte Brigitte, il fut délivré de la tentation, en telle sorte qu'il ne pouvait se réjouir qu'au jour où il communiait, et le nom de la Sainte Vierge lui fut à l'avenir très doux à la bouche et au cœur.

D'ailleurs, un prêtre, ensorcelé par une enchanteresse, concernant les mauvais désirs charnels, priait Sainte Brigitte de vouloir prier Dieu pour lui, laquelle étant ravie en esprit, ouït : Vous admirez, ô ma fille, pourquoi le diable domine en l'homme : Il fait cela par l'inconstance de la volonté des hommes, comme vous pourrez le voir en ce prêtre qui a été ensorcelé et charmé par une femme.

Sachez donc que cette femme a trois choses, savoir, l'infidélité, l'endurcissement, les désirs et les cupidités de l'argent et de la chair. C'est pourquoi le diable, s'approchant d'elle, lui fournit de la lie amère de son poison. Sachez aussi que la langue de cette femme sera sa fin, ses mains seront sa mort, et le diable sera le conducteur de son testament.

Toutes ces choses arrivèrent de la sorte, car la troisième nuit, cette sorcière fut furieuse, et ayant pris un couteau, elle se frappa en l'aine, criant à la présence et audience de tous : Venez, ô diable ! Suivez-moi. Et soudain, elle finit la vie avec une horrible voix. Mais le prêtre susdit fut affranchi des tentations de la chair, et soudain il entra en religion, où il fit un fruit agréable à Dieu.