Pour le jour de la Purification.
La Sainte Vierge Marie dit à l’épouse de son Fils : Ma fille, sachez que je
n’avais point besoin de purification comme les autres femmes, car mon Fils, qui
est né de moi, m’avait purifiée, et je n’avais pas contracté une des plus
petites taches, lorsque j’engendrai mon Fils, qui est la pureté même. Mais
néanmoins, afin que la loi et les prophètes fussent accomplis, j’ai voulu vivre
en la loi, ni je ne vivais pas selon les apparents du siècle, mais je conversais
humblement avec les humbles. Je n’ai voulu avoir en moi quelque chose de
particulier, tant j’aimais tout ce qui touchait l’humilité!
Un jour, comme aujourd’hui, ma douleur prit accroissement, car bien que je susse
par l’inspiration divine que mon Fils pâtirait, néanmoins, lorsque Siméon dit
qu’il me serait le glaive de douleur et qu’il me serait le signe que l’on
contredirait, cette douleur perça mon cœur avec plus d’amertume, douleur,
certes, qui ne se retira jamais de mon cœur, jusqu'à ce qu’en corps et en âme je
montai au ciel, bien qu’il fût tempéré par les consolations du Saint-Esprit. Je
veux que vous sachiez que, ce jour-là, ma douleur fut en six manières :
1- En ma connaissance, car autant de fois que je le regardai, que je
l’emmaillotai, que je voyais ses mains et ses pieds, tout autant de fois mon
esprit était comme plongé en une nouvelle douleur, car je pensais comment on le
crucifierait.
2- En mon ouïe, car tout autant de fois que j’oyais les opprobres qu’on
vomissait contre mon Fils, les mensonges et les embûches, mon esprit était comme
emporté par la douleur, de sorte qu’à grand peine il se pouvait tenir ; mais la
vertu divine donna la manière et l’honnêteté, afin qu’on ne remarquât en moi
rien d’imparfait.
3- En la vue, car quand je vis qu’on fouettait mon Fils, qu’on le clouait,
qu’on le pendait en un gibet, je tombai comme morte ; mais prenant courage, je
demeurai auprès, debout et souffrant tout cela si patiemment que mes ennemis ni
autres ne trouvaient en moi que douleur.
4- En l’attouchement, car moi et les autres descendîmes mon Fils de la croix ;
je l’enveloppai et le mis dans le sépulcre, et de la sorte, ma douleur
augmentait tellement qu’à peine mes mains et mes pieds avaient-ils la force de
me soutenir. Oh ! que volontiers j’eusse voulu alors être ensevelie avec mon
Fils !
5- Je souffrais à raison du désir véhément que j’avais d’aller au ciel, après
que mon Fils y fut monté, car la longue demeure que je fis en terre après son
départ augmentait grandement ma douleur.
6- Je souffrais de la tribulation des apôtres et des amis de Dieu, la douleur
desquels était ma douleur, craignant toujours qu’ils ne succombassent aux
tentations et tribulations, et dolente, d’autant que les paroles de mon Fils
étaient contrariées par tout. Or, bien que la grâce de Dieu persévérât toujours
avec moi et que ma volonté fût selon la sienne, néanmoins ma douleur fut
continuelle, mêlée avec la consolation, jusqu’à ce que je fusse au ciel, en
corps et en âme auprès de mon Fils. Partant, ô ma fille, que cette douleur ne se
retire jamais de votre cœur, car sans les tribulations, peu de gens seraient
sauvés.
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