Le Fils de Dieu parle à l’épouse sainte Brigitte, lui disant : Ecrivez de ma
part au pape Clément (sans doute Clément VI, l'an 1352) ces paroles : Je vous ai
exalté et vous ai fait monter par-dessus tous les degrés d’honneur : sortez donc
pour faire la paix entre le roi de France et le roi d’Angleterre (Philippe de
Valois et Edouard III), qui sont des bêtes périlleuses et les pertes des âmes.
Venez après en Italie, et annoncez là la parole et l’an de salut et de la
délectation divine, et voyez la place et les carrefours arrosés du sang de mes
martyrs, et je vous donnerai la récompense qui ne finit jamais.
Considérez aussi le temps passé, où vous m’avez provoqué à la colère avec effronterie, et je l’ai
tu, où vous avec fait ce que vous avez voulu et ne deviez pas faire, et moi,
comme ne jugeant point, j’ai eu patience, car mon temps s’approche, et je
demanderai vos négligences et l’audace de votre temps ; et comme je vous ai fait
monter par tous les degrés, de même descendrez-vous par tous les degrés
spirituels, lesquels vous expérimenterez au corps et en l’esprit, si vous
n’obéissez à mes paroles ; et votre langue gardera le silence des grandes
choses, et votre nom, qui est grand en terre, sera en oubli devant moi et en
opprobre devant mes saints.
Je demanderai encore de vous combien indignement vous êtes monté à tous ces
degrés d’honneur, quoique j’aie permis ce que je sais et ce que votre conscience
négligente a oublié. J’exigerai encore de vous combien froid vous avez été à
former la paix des rois, et combien vous avez penché en la partie contraire.
D’ailleurs, je n’oublierai point combien l’ambition a été grande et la cupidité
insatiable en l’Eglise, et a augmenté de votre temps, ce que vous pouviez
beaucoup réformer et amender ; mais vous, qui aimez la chair, n’avez voulu.
Sortez donc, avant que la dernière heure qui s’approche, vous surprenne, et
éteignez en ce temps, par le zèle, les négligences du passé. Que si vous doutez
de quel esprit ces paroles sont, le royaume et la personne vous sont connus où
ont été opérés les merveilles et les prodiges. La justice et la miséricorde
s’approchent par toute la terre. Votre conscience dit que ce que je vous dis est
raisonnable, et charité ce que je vous conseille ; et si ma patience ne vous eût
conservé, vous fussiez descendu plus bas que vous prédécesseurs. Partant,
fouillez au livre de votre conscience, et voyez si je vous dis la vérité.
|