O épouse, vous avez pensé à part vous ce qui suit : Puisque mon Dieu Seigneur de
toutes choses, tout-puissant, et a patiemment souffert le traître, pourquoi ne
souffrirai-je sa créature, ceux qui demeurent avec moi, de peur que, de mon
avertissement et répréhension, ils ne deviennent pires?
Je réponds maintenant à cette pensée, qu'elle était en partie pieuse mais moins
fervente, car un bon soldat qui est entre les mauvais, voyant l'offense de son
seigneur, s'il ne peut corriger par œuvre la faute, parle pour le moins de la
bonté de son maître, et souffre patiemment les contumélies qui résultent de là :
de même vous, parlez-leur fidèlement de leurs excès, qui, à raison de la
diuturnité des péchés dans lesquels ils croupissent, me sont rendus abominables
; et bien qu'ils s'endurcissent en quelque manière que ce soit, à raison de
votre répréhension, il ne vous sera pas imputé à péché, mais bien à plus grande
récompense. Car comme les apôtres, qui prêchaient à plusieurs, et tous ne se
convertissaient pas, n'étaient pas pour cela privés de la récompense, de même
vous en arrivera-t-il, car bien que tous ne vous écoutent point, néanmoins, il y
en aura quelques-uns qui seront édifiés par vos paroles et qui seront guéris.
Dites-leur donc que, s'ils ne s'amendent, il viendra promptement et sévèrement à
eux, et tous ceux qui l'oiront en gémiront de crainte et d'effroi, et tous ceux
qui goûteront ma sévérité, défaudront. Je les jugerai comme des larrons, par des
confusions inexprimables devant les anges et tous les saints, et ce, d'autant
qu'ils ont reçu l'habit de religion, non pour bien vivre. C'est pourquoi ils
sont devant moi comme des larrons qui possèdent les biens qui ne leur
appartiennent pas, mais sont à ceux qui vivent bien, et comme défraudateurs, je
les jugerai et les condamnerai à mon glaive, qui coupera leurs membres de la
tête jusqu aux pieds. Je les remplirai encore d'un feu bouillant qui ne
s'éteindra jamais.
Je les en ai avertis, comme un père plein de pitié, et ils
n'ont point voulu m'écouter ! Je leur ai montré les paroles de ma bouche plus
que jamais je n'avais fait auparavant, et ils m'ont méprisé ! Si j'eusse envoyé
mes paroles aux païens, peut-être se fussent-ils convertis et eussent fait
pénitence. Partant, je ne leur pardonnerai point, ni ne recevrai point les
prières ni celles que ma Mère et mes saints, font pour eux, mais ils seront tout
autant dans la peine que je serai dans la gloire qui sera sans fin. Néanmoins,
tant que leur âme sera dans leur corps, ma miséricorde leur sera ouverte.
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