Des avertissements pour le roi de Cypre.
Chapitre 18

L’épouse sainte Brigitte écrit au roi de Cypre et au prince d’Antioche, et lui donne des conseils :
1° Qu’un chacun fasse avec son confesseur une confession générale de tout ce qu’il a commis contre la volonté divine, et qu’après il reçoive le corps précieux de Notre-Seigneur avec crainte et amour.

2° Que vous soyez unis tous deux ensemble au vrai amour, de sorte que vous ne soyez qu’un cœur en Dieu pour son honneur, pour sa gloire et pour l'utilité de vos sujets.
3° Que tous deux (1) soyez unis en amour avec vos sujets, pardonnant, pour l’amour de la passion de Jésus-Christ et de sa mort, à tous ceux qui, de conseil, d’effet ou faveur, ont été cause ou occasion de la mort de Pierre, roi et votre père, les recevant tous en votre charité et amour de tout votre cœur, afin que Dieu vous daigne recevoir en sa miséricorde, et afin qu’il vous veuille aussi affermir en votre gouvernement pour son honneur et gloire.

4° Que, puisque la divine Providence vous a établis gouverneurs de ce royaume, vous y apportiez toute la diligence que vous pourrez, à prendre conseil, et à conseiller efficacement avec une âme fervente de charité, tous les prélats, tant séculiers que réguliers, que tous leurs sujets se corrigent en toutes les choses esquelles ils se sont écartés du saint état des Pères, leurs prédécesseurs, spirituellement ou temporellement, afin de vivre selon le premier état de leurs prédécesseurs. Qu’ils réforment donc au plus tôt leur état en tout et par tout, afin qu’eux et leurs sujets, étant vraiment amendés, obtiennent l’amitié de Dieu, et soient rendus dignes de prier Dieu qu’il daigne, par sa miséricorde, renouveler l’état de la sainte Église universelle en la sainteté des vertus.

5° Que, pour cette grande charité que Dieu a eue pour vos âmes, vous aimiez aussi celles de vos sujets, conseillant à votre peuple militaire que, s’il a offensé en quelque chose, il en fasse soudain pénitence et se corrige, et que tous ceux qui sont sous l’obéissance de l’Église romaine, qui sont parvenus aux ans de discrétion, se confessent humblement, se réconcilient avec le prochain qu’ils ont offensé, et s’accordent, et que s’étant amendés, ils reçoivent le corps de Jésus-Christ; après, qu’ils mènent une vie catholique, vivent avec fidélité dans le mariage, ou en veuvage, ou bien en l’état louable de virginité, observant tout ce que la saint Église commande, y poussant tous les familiers domestiques, sujets, et tous ceux qu’ils pourront, à en faire de même, tant par leurs paroles que par leurs bons exemples, et par les œuvres de charité, les induisant à en faire et les affermissant en leurs saintes entreprises; et sachez pour certain que tous ceux qui ont voulu obéir au corps, souffriront le dommage en leur âme.

(1) Éléonor, reine de Cypre, et son fils, aussi roi de Cypre.

6° Que vous disiez à tous les prélats qu’ils avertissent efficacement et souvent leurs prêtres, savoir, les recteurs des églises; que chacun regarde si, en la paroisse, il y a quelqu'un qui persiste en quelques péchés publics, en l’offense de Dieu et au mépris de la sainte Église; et ceux qu’il trouvera vivre impudemment en ces péchés publics, qu’il les avertisse efficacement du danger de leur âme, et leur enseigne les manières et les remèdes spirituels par lesquels ils puissent s’en retirer et humblement s’amender. Or, s’ils ne veulent obéir, mais désirent vivre en leurs péchés publics, que les recteurs des paroisses ne manquent pas de les dénoncer aux supérieurs et aux évêques, afin que l’opiniâtreté de ces gens-là soit punie par les évêques, sans avoir égard à leur puissance temporelle, et Dieu vous commande de prêter main forte aux évêques pour cet effet, afin que, par votre secours et faveur, les susdits pécheurs soient corrigés et amendés, et qu’ils obtiennent la miséricorde de Dieu.