Bénie soyez-vous , ô Marie , qui êtes Vierge et Mère, après avoir enfanté
Jésus-Christ ! J’ai autrefois ouï que comme plusieurs personnes de grande
qualité et sages rendaient témoignage à une autre personne que Jésus-Christ
était la piété et la miséricorde même , une troupe de pauvres qui étaient bien
éloignés , se mit à crier que leur témoignage était véritable. O ma très-chère
Dame , il me semble que ceci peut être dit pour vous, parce que tous les saints,
personnes vraiment nobles et sages, témoignent que vous êtes véritablement
très-pieuse et miséricordieuse.
Mais moi , qui suis de la troupe des pauvres, n’ayant rien de bon de moi même, je crie à haute voix que leur témoignage est
très véritable, et selon ce, j’ai recours à vous, et vous prie d’avoir pitié de
moi ; je crains d’être en grand danger , parce qu’il me semble que je suis à la
porte de deux maisons , l’une desquelles est grandement lumineuse, et l’autre
pleine de ténèbres ; et lorsque je tourne les yeux vers cette maison ténébreuse
, tout ce que j’ai vu en cette maison de lumière ne semble être qu’un songe, qui
s’est présenté de nuit à mes yeux.
La bienheureuse Vierge répondit : Encore que je sache tout ce que tu as vu ,
dis-moi néanmoins ce que tu as remarqué plus particulièrement en cette maison
des ténèbres.
Je répondis : Il me semble qu’en cette maison obscure, il y avait comme une
entrée et une sortie bien étroites. Au delà de la sortie, il y avait une clarté
fort lumineuse, où l’on voyait toutes choses délectables. Il y avait à l’entrée
plusieurs chemins qui conduisaient à la sortie , et sur chaque chemin, il y
avait cinq ennemis mortels , de tous ceux qui passaient par les autres chemins.
Le premier ennemi parlait aux passants avec paroles douces et emmiellées, mais
il jetait souvent des flammes ardentes dans les oreilles de ceux qui
l’écoutaient.
Le deuxième tenait en sa main toute sorte de fleurs et de fruits qui se
flétrissent ou se gâtent bientôt , mais il pochait les yeux avec une lance
très-acérée à tous ceux qui les regardaient avec désir de les posséder.
Le troisième ennemi tenait un vase plein de venin , dont les bords étaient
frottés d’un peu de miel , tout lequel il renversait dans le gosier de ceux qui
en goûtaient.
Le quatrième avait plusieurs beaux et précieux lits ornés d’or et d’argent et de
rares pierreries ; mais quiconque les touchait avec désir de les posséder, était
piqué d’un serpent venimeux.
Le cinquième jetait un lit de plumes aux pieds des passants, mais dès que
quelqu’un prenait plaisir à s’y arrêter, cet ennemi tirait ce coutil , et ainsi
, celui qui espérait se reposer tombait de fort haut sur des rochers grandement
raboteux.
(1) Ce chapitre est très-mal conçu en latin.
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