L’épouse de Jésus-Christ , priant la Vierge, disait : O ma très chère Dame, je
vous prie, par la charité de votre Fils bien-aimé, qu’il vous plaise m’assister
à ce que je l’aime de tout mon cœur. Je me sens faible à l’aimer de telle
ferveur que je devrais, c’est pourquoi je vous prie, ô Mère de miséricorde ,
qu’il vous plaise délier entièrement mon cœur de toute affection des choses
périssables, l’attacher à l’amour de Dieu et l’attirer à votre Fils , d’autant
puissamment que vous le trouverez pesant.
La bienheureuse Vierge répondit : Béni soit celui qui inspire de telles oraisons
! Mais quoique mon entretien te soit agréable, va-t-en coudre la tunique de ta
fille , qui se plaît plus à en porter une vieille et raccommodée qu’une neuve ,
et désire plus la bure grise que les draps d’or ou de soie. Qu’elle est heureuse
d’avoir ainsi quitté les choses mondaines!
Elle a quitté son mari de son consentement , le corps duquel elle a plus aimé que soi-même , et l’aime encore
beaucoup plus que le corps de tous deux. Elle a abandonné corporellement ses
frères et ses sœurs , ses parents et ses amis , pour les pouvoir assister spirituellement ; elle a méprisé toutes les richesses caduques
et périssables. Oh ! qu’elle est heureuse d’avoir ainsi abandonné le monde ! car
ce mépris et ce délaissement lui ont apporté l’entière rémission de tous ses
péchés. Qu’elle persévère seulement, elle obtiendra le ciel en échange de ce
qu’elle a quitté en terre , et aura Jésus-Christ pour époux, et tous ceux qui
l’aiment profiteront en Dieu pour l’amour d’elle.
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