Notre-Seigneur Jésus-Christ parle : Je suis le Dieu de tous, dont Moïse ouït la
voix dans le buisson, Jean au Jourdain et Pierre en la montagne. J’ai crié à
vous, ô hommes, avec miséricorde; j’ai crié en la croix pour vous avec larmes :
Ouvrez les yeux et regardez-moi, car moi qui parle, je suis très-puissant,
très-pieux, et avec tout cela, très-beau sur toutes choses. Voyez, et
informez-vous de ma puissance en la vieille loi, et vous la trouverez en la
création de toutes les créatures; et encore je suis admirable et formidable;
vous trouverez ma force ès rois qui ont été rebelles, ma sapience en la création
et la disposition des visages humains, en la sagesse des prophètes;
informez-vous en la domination de la loi et en l’affranchissement de mon peuple.
Voyez ma justice au premier ange et au premier homme; voyez-la au déluge;
voyez-la en la subversion des cités et des villes; voyez ma patience à supporter
mes ennemis; voyez-la aux avertissements par mes prophètes; enfin voyez et
considérez ma beauté en l’éclat et opération des éléments, en la glorification
de Moïse, et lors voyez combien dignement vous m’aimez et me devez aimer. Voyez
encore que je suis celui-là même qui parlait en la nouvelle loi, très-puissant
et très-pauvre : très- puissant en l’adoration des mages et en la démonstration
de l'étoile; très-pauvre, ayant été enveloppé de langes et couché dans une
crèche.
Voyez-moi encore réputé très-sage et très-fou : très-sage, puisque les
adversaires ne pouvaient me répondre; très-fou, étant repris de mensonge, et
jugé comme coupable. Voyez-moi très-vertueux et très-méprisé : très-vertueux en
la guérison des malades et à chasser les diables; très-méprisé, étant fouetté en
tous mes membres. Voyez qu’étant très-juste, je suis réputé très-injuste : je
suis très-juste en l’institution de la vérité et de la justice; réputé
très-injuste, étant condamné à une mort si horrible. Voyez-moi encore
très-pieux, et être traité d’une manière très-impie : très-pieux en la
rédemption et l’abolition des péchés; traité d’une manière impie, étant en un
gibet avec des larrons. Voyez-moi enfin très-beau en la montagne, très-laid en
la croix, d’autant que je n’avais ni figure ni éclat.
Voyez que je suis celui qui parle à vous, qui ai pâti pour l’amour de vous.
Contemplez, non avec les yeux de la chair, amis avec ceux de l’esprit. Voyez ce
que je demande de vous, ce que je vous ai donné et ce que vous me rendrez. Je
vous ai donné l’âme sans souillure, rendez-moi l’âme sans souillures; je
pâtissais pour vous, afin que vous me suiviez; je vous ai enseigné, afin que
vous viviez, non selon vos volontés, mais selon les miennes. Oyez d’ailleurs ma
voix qui vous dit : Faites pénitence.
Oyez ma voix qui criait au gibet : J’ai soif de vous. Oyez encore ma voix, qui dit plus hautement : Si vous ne faites
pénitence, le malheur vous accablera, malheur qui sèchera votre chair, serrera
votre âme de crainte; vos moelles se dessècheront ; votre force sera affaiblie ;
votre beauté se flétrira ; la vie vous sera à dégoût : vous chercherez la fuite
et vous ne la trouverez pas : partant, fuyez vitement à la cachette de mon
humilité, de peur que le malheur qui vous menace ne vous arrive. On vous menace
afin de l’éviter, et vous l’éviterez, si vous le croyez et le fuyez ; autrement
l’évènement donnera foi à mes paroles ; néanmoins en verrez-vous de sages, si je
manque à ce que je promets, bien que je patiente, et en patientant, j’attends ce
fruit de la conversion.
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